Pondichéry ou le rivage des ombres – Anne Vantal – Buchet-Chastel- 02 Mai 2024.

Pondichéry ou le rivage des ombres… Le titre à lui seul est une invitation au voyage… J’ai été happée par ce récit qui nous dépeint l’ancien comptoir français à différentes époques, au cours des années 1930, 1950 et 2000, et j’ai été envoûtée par la course folle de la plume d’Anne Vantal pour nous conter le destin noué de trois françaises expatriées dans cette ville, qui ne s’attendent nullement aux bouleversements qui vont respectivement transformer leurs vies…

Nous suivons tout d’abord Alice, une femme de 25 ans, fraichement mariée qui débarque à Bombay en 1930 pour rejoindre Jules, son époux, médecin dans une léproserie. Le couple s’installe ensuite dans une villa de Pondichéry où la jeune femme exerce ses talents de pianiste lors de récitals auprès de la haute-société. Au cours d’une correspondance avec sa soeur Jeanne, elle dévoile ses premiers émois face à une ville qu’elle ne connait pas et à une population locale qu’elle a hâte d’apprécier. En 1950, Oriane, française elle aussi, retrouve Pondichéry, sa ville natale, dont elle ne garde que de vagues souvenirs. Elle loge chez Madeleine, une amie de sa tante, et s’occupe avec elle de bonnes oeuvres. En 2012, Céline est une jeune sage-femme dévouée à son métier qui officie à l’hopital de Pondichéry. Elle a quitté la France pour échapper à un drame familial. Ce voyage serait-il pour elle l’occasion de se reconstruire ?

La comparaison avec La Tresse de Laëtitia Colombani m’est venue à l’esprit au cours de ma lecture, ainsi que l’image d’une broderie délicate autour de la vie de trois femmes à différentes époques, qui bien sûr ne se rencontrent pas mais qui sont indéniablement liées. Pondichéry ou le rivage des ombres est un roman dense, développé, dont la construction est habilement maitrisée. Le travail de recherches d’Anne Vantal a dû être conséquent pour produire un roman aussi riche de détails tant sur le plan culturel, géographique et historique. J’ai aimé le style de l’auteure, la préciosité des termes employés et la quête exigeante d’un vocabulaire adapté. J’ai choisi de découvrir ce livre dans l’espoir d’en apprendre plus sur un pays qui m’intrigue et m’intéresse (comme tant d’autres) et sur lequel j’ai très peu de connaissance. J’ai été agréablement surprise d’être transportée au cours des pages de ce roman, à différentes époques dans un lieu aussi envoûtant que Pondichéry. Je parle d’immersion car j’ai appris beaucoup sur les diverses castes qui cohabitent parmi la population de la ville. Tout est décrit avec minutie, de la végétation luxuriante aux bâtiments et monuments issus de plusieurs générations et communautés.

Tout en préservant un style fluide et l’intérêt constant de son lecteur, l’autrice aborde les multiples problèmes qu’a connu ce pays au fil des ans. Ce roman incroyablement riche est ancré dans l’Histoire. La multitude de sujets évoqués font de ce récit une mine d’information sur Pondichéry et son passé tourmenté: du sort réservé aux petites filles indiennes qui, de tout temps, sont dénigrées, jusqu’aux doutes émis par la population locale sur les revers de la Grande Histoire. Un passé tourmenté autant que les vies de ces trois femmes, dont l’émouvant destin m’a profondément émue. Même si l’autrice est du métier depuis plusieurs années en tant qu’auteure jeunesse, il est important de souligner qu’il s’agit d’un premier roman. Si prenant et magnifique que je ne peux que vous le conseiller ! Je remercie vivement les Editions Buchet-Chastel et Netgalley pour leur confiance.