J’irai tuer pour vous – Henri Loevenbruck

Les livres lus de cet auteur, Le Rasoir d’Ockham et Le Mystère Fulcanelli, m’ayant laissé bon souvenir, j’ai réservé J’irai tuer pour vous sur le catalogue de ma bibliothèque les yeux fermés, quasi sûre de trouver là une bonne lecture… Le pavé de 600 pages d’une fine écriture, aux chapitres serrés, et pour tout dire au sujet politique un rien rébarbatif, m’a dans un premier temps quelque peu découragée… Mais une fois absorbés les premiers chapitres, l’alchimie romanesque fait son effet : impossible de lâcher ce roman époustouflant.

Thriller d’espionnage basé sur des faits réels, ce livre nous transporte au milieu des années 80 dans un contexte géopolitique extrêmement documenté comme en attestent les références bibliographiques : une série d’attentats ensanglantent Paris, tandis que croupissent au Liban des otages français dont le sort est entre les mains de politiciens plus préoccupés par leur stratégie pré-électorale… Dans les coulisses du gouvernement où nous convie Henri Loevenbruck, nous sommes témoins de rivalités politiques, de tractations intéressées et d’entretiens particuliers entre le Président Mitterand et son premier ministre de l’époque Jacques Chirac, et le non moins charismatique Charles Pasqua, ministre de l’Intérieur. Ceci pour la toile de fond.

Car le personnage principal de ce roman auquel Henri Loevenbruck a choisi de rendre hommage est un jeune homme, Marc Masson, recru clandestin de la DGSE, intègre, droit dont la seule et unique motivation est de défendre le plus faible, de protéger le peuple français, jusqu’à une extrême abnégation de soi. Ce personnage, dynamique romanesque du livre, est une figure héroïque actuelle, un homme de l’ombre, humble, un brin philosophe, d’une sensibilité déconcertante comme en témoignent ses carnets, en dépit du fait que ce soit « une machine à tuer ». Un être extrêmement attachant, car tout en lui respire l’authenticité : Henri Loevenbruck s’est si longuement entretenu avec l’ancien agent, qu’il en vient à le considérer comme un ami. L’hommage si réaliste donne au lecteur l’impression d’être en immersion dans ce monde secret.

Ce livre propose un point de vue sur une partie de notre Histoire, soulève des questions, pousse à la réflexion. Instructif donc, humaniste également. Le travail fournit par l’auteur est impressionnant et ne peut qu’être applaudi: tout est minutieusement détaillé et organisé de façon à ce que la lecture soit fluide et agréable, le suspense entretenu du début à la fin.