De bonnes raisons de mourir – Morgan Audic – Livre de Poche, Juin 2020.

Tant de bonnes raisons de lire ce roman dont la portée va bien au-delà d’un simple thriller : une trame classique mais un contexte époustouflant et remarquablement développé.

Le cadavre mutilé de Léonid Sokolov est retrouvé suspendu à la façade d’un bâtiment abandonné de Pripiat, Ukraine, devenue ville fantôme depuis l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl. Une ville qui attire pourtant hordes de « touristes » curieux, de squatteurs, et d’anciens habitants revenus y vivre en dépit de tout bon sens. Deux hommes vont mener l’enquête, séparément et pour des motivations bien différentes. Le capitaine de police Joseph Melnyk découvre que la mère de la victime a été assassinée avec une voisine le 26 avril 1986, jour de l’explosion de la centrale. Quant au père de Léonid Sokolov, il n’est autre qu’un ancien ministre de l’énergie sous Boris Eltsine, et dirigeant d’une grande firme pétrolière… Celui-ci offre une grosse somme d’argent à Alexandre Rybalko, un flic moscovite, pour qu’il retrouve le meurtrier de son fils et le tue. Le criminel signe ses crimes d’une hirondelle empaillée, ce qui guide les enquêteurs vers le monde de la taxidermie.

Ce qui m’a intrigué et poussé à aller vers ce roman, c’est bien sûr l’endroit où l’auteur situe son intrigue: la zone interdite de Tchernobyl. L’idée de départ pour développer ce thriller est excellente, mais la pertinence de l’auteur ne s’arrête pas là: Morgan Audic fournit un travail extrêmement documenté sur la zone, son histoire et le contexte politique passé et présent entre la Russie et l’Ukraine. L’immersion est totale, à tel point que j’ai crû l’auteur natif d’Ukraine, alors qu’il est breton!

L’écriture est maîtrisée et méticuleuse, l’auteur prend le temps pour les descriptions et accorde une grande importance à l’atmosphère que dégage le lieu: c’est ce que j’ai le plus aimé dans ce roman. Des personnages cernés à point, dont la vie nous prend aux tripes, évoluent dans une grisaille envahissante : rien de tel pour un thriller que les mauvaises ondes de Tchernobyl. Je m’attendais toutefois à ce que l’enquête prenne une autre tournure, plus politique peut-être, mais je n’ai pas été déçue car la force de ce roman réside dans la retranscription du contexte d’une tragédie à l’impact international et durable.

Pour moi, un livre choc ! Coup de coeur !