Mrs March – Virginia Feito – Le Cherche-Midi – 27/01/2022.

Mrs March vit dans un immeuble cossu de l’Upper East Side, New York. Elle mène une existence discrète dans l’ombre de son époux, le célébrissime écrivain George March. Une rumeur semble courir au sujet de son dernier roman: comme le suggère sa pâtissière, Mrs March a-t-elle servi de modèle pour le personnage de Johanna, une prostituée au portrait peu flatteur? Sans pour autant avoir de preuve à ce sujet, Mrs March se sent trahie et humiliée. Elle décide d’enquêter sur la vie intime de son mari, et découvre qu’il s’intéresse de près au viol et au meurtre d’une jeune femme, affaire survenue non loin du chalet de pêche dans lequel il se rend régulièrement. Mrs March connait-elle vraiment son époux ou son existence de femme oisive et esseulée la rend t-elle paranoïaque ?

Quel étrange roman ! Un univers anxiogène qui n’est pas sans rappeler certains films d’Alfred Hitchcock ou de David Lynch, je vous avoue que l’originalité de ce roman m’a passionnée, même si je lui ai trouvé quelques défauts : excessif parfois, quelques clichés et… je n’ai pas eu la réponse à toutes les questions que je me suis posées au cours de ma lecture. Mais le portrait de Mrs March est saisissant et j’ai véritablement eu envie de savoir le fin mot de l’histoire ! On trouve tout d’abord à cette Mrs March une certaine « préciosité », qui la rend autant attachante qu’agaçante. On plaint sa condition de femme au foyer, elle qui « attend fidèlement son mari comme un chien attend son maître », elle n’a que peu d’intérêt pour son fils et réciproquement, elle craint sa propre gouvernante, se soucie du quand dira t-on et subie une vie faite d’apparences. Pourtant elle ne manque pas de moyens financiers mais elle est incapable de profiter de sa liberté, n’a aucune passion, aucune amie véritable. Sans le réaliser, elle « crève » de n’être que « la femme de« . Elle est tellement gentille qu’elle n’a pas de reconnaissance sociale et souffre d’un complexe d’infériorité. Elle est anxieuse, dépressive et développe une sorte de psychose paranoïaque qui la mène à vivre des situations incongrues. Nous avons donc là une sorte de desperate housewife plutôt inquiétante. Finalement de qui doit-elle se méfier ? De ses proches ou d’elle même?

Mrs March est un roman addictif, au style fluide et plaisant : j’ai trouvé ce portrait de femme en proie au doute et à la paranoïa, dont le monde s’effondre progressivement, terriblement captivant. Mais on ne connait pas l’origine profonde de ses délires psychotiques, je m’attendais à un traumatisme plus ancré dans le passé, mais qui n’a pas été vraiment évoqué. Il m’a manqué certains éléments pour véritablement comprendre ce roman, la fin est assez choquante certes mais ne m’a pas apporté toutes les réponses attendues. Je conseille pourtant fortement ce huis-clos psychologique asphyxiant dont je retiendrais l’ intensité.

Je remercie les Editions du Cherche-Midi via Netgalley pour ce partenariat.